Dans la presse en 2023

Ces lanceuses d’alerte qui ont fait trembler les plus grands

LE TELEGRAMME

Ce sont celles par qui le scandale arrive... En dévoilant au grand jour les secrets les plus

enfouis, les lanceuses d'alertes deviennent les héroïnes des temps troublés. Retour sur ces femmes qui ont osé briser la loi du silence (liste non exhaustive !). Chaque jour, de nouveaux scandales arrivent, qu'ils soient politiques, financiers, environnementaux, sanitaires, etc. Derrière eux, se cachent des hommes et des femmes qui ont osé « parler », parfois au prix de sévères représailles. À l'instar de Maureen Kearney, incarnée sur grand écran par Isabelle

Huppert dans le film « La syndicaliste » (qui sort en salle ce mercredi 1er mars 2023), syndicaliste CFDT chez Areva et qui a lancé l'alerte sur un accord entre la Chine, EDF et Areva pour construire des centrales nucléaires à bas coût. C'est quoi une lanceuse d'alerte ? Depuis 2016, en France, un lanceur d'alerte est défini comme « une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave

et manifeste d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l'intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance » (loi du 9 décembre 2016). À noter qu'en 2022, une nouvelle loi a été adoptée pour mieux protéger ces lanceurs d'alerte.

Les « grandes » lanceuses d'alertes françaises - Irène Frachon. Cette pneumologue de l'hôpital de Brest est sans doute l'une des lanceuses d'alerte françaises les plus célèbres... Elle a révélé, en 2010, le scandale du Mediator, ce médicament (un antidiabétique largement prescrit en coupe-faim) prescrit à quelque 5 millions de personnes en France. Il a été commercialisé pendant plus de 30 ans par le laboratoire Servier, accusé de l'avoir mis en vente alors qu'il en connaissait les effets toxiques. Ce poison mortel pour le cœur serait à l'origine de milliers de morts. Se tient actuellement le procès en appel du Médiator.

Notre dossier spécial sur le procès du Mediator - Dans la même veine, il y a aussi Marine Martin, cette maman de deux enfants handicapés qui a fait éclater le scandale de la Dépakine, cet anti-épileptique qu'elle a pris pendant ses grossesses. En 2011, elle crée l'association d'Aide aux Parents d'Enfants souffrant du Syndrome de l'Anticonvulsivant (APESAC), qui porte depuis 2011 le combat de plusieurs milliers de victimes de la Dépakine. Le 5 janvier 2022, le

tribunal de Paris a considéré comme recevable l'action collective intentée par des victimes contre le laboratoire Sanofi. Notre dossier spécial sur l'affaire de la Dépakine - La tristement célèbre affaire du sang contaminé a été mise en lumière à travers les articles de la journaliste médecin Anne-Marie Casteret.

De 1986 à 1991, elle publie plusieurs articles de presse alertant sur le fait que des patients ont été contaminés par le VIH ou l'hépatite C à la suite de transfusion sanguine. Le tout alors que le Centre national de transfusion sanguine (CNTS) aurait été au courant... - Emmanuelle Amar a, quant à elle, réussi à faire ouvrir une enquête de Santé Publique France, en 2018, dans l'affaire des « bébés né sans bras » (notamment dans l'Ain, le Morbihan et en Loire-Atlantique). L'épidémiologiste avait alors reçu une lettre de licenciement (une procédure finalement suspendue quelques semaines plus tard). Bébés nés sans bras. L'hypothèse de l'eau évoquée - On peut aussi citer Yasmine Motarjemi, directrice de la sécurité alimentaire chez Nestlé où elle arrive en 1999. Elle commence à dénoncer des dysfonctionnements en matière de sécurité alimentaire : elle se démène pour que la composition de certains biscuits soit modifiée après avoir été mise au courant que des bébés aient failli s'étouffer avec ces derniers. Ce qui lui vaudra une mise au placard.

Pizzas Buitoni : la responsable de la sécurité des aliments avait alerté sa direction - Dans le domaine de la finance, la française Stéphanie Gibaud, à l'origine de révélations de fraude fiscale dans l'Hexagone du géant bancaire UBS, a été reconnue officiellement lanceuse d'alerte par le Défenseur français des droits. En décembre 2021, la banque suisse a été condamnée, en appel, à 1,8 milliard d'euros pour blanchiment aggravé de fraude fiscale et démarchage bancaire illégal en France entre 2004 et 2012. On pense aussi à Ida de Chavagnac, licenciée après avoir dénoncé ce qu'elle estimait être une « dérive commerciale » au Crédit Agricole. en octobre 2021, les magistrats ont d'ailleurs prononcé la nullité de son licenciement.

- D'autres auront moins de chances à leurs procès à l'instar de Laura Pfeiffer qui, après sept ans de procédure judiciaire, a été sanctionnée (en mars 2021) pour violation du secret professionnel et recel de documents confidentiels dans « l'affaire Tefal ». Cette inspectrice du travail entendait prouver la collusion entre l'entreprise et l'Inspection du travail en vue d'entraver l'action de Laura Pfeiffer,qui venait de demander la renégociation de l'accord 35 heures de l'entreprise. Bretagne. Les inspecteurs du travail manifestent leur malaise

Tout comme la diplomate Nicole-Marie Meyer qui se verra « rétrograder » à des postes moins importants après avoir dénoncé des dérives inquiétantes avec des faux et usages de faux et abus de biens sociaux. Elle remporte finalement son procès en 2007. Elle est aussi devenue experte en lanceurs d'alerte pour l'ONG Transparency International. - Certaines lanceuses d'alertes ont dénoncé les ravages environnementaux : c'est le cas par exemple d'Inès Léraud,

qui a rendu public le scandale des algues vertes en Bretagne ; ou encore de Valérie Murat, engagée dans la lutte contre les pesticides avec son association Alerte aux toxiques, qui dénonce les risques sanitaires pour les travailleurs agricoles et viticoles, ainsi que pour les riverains. Tout comme Emmanuelle Reix, qui a créé le collectif Alerte pesticides. Algues vertes. La BD qui jette un pavé dans la mareLes lanceuses d'alertes américaines Les Françaises n'ont pas l'apanage du courage : voici quelques grandes figures féminines américaines qui se sont illustrées dans la dénonciation de scandales. - Chelsea Manning La Britannique et Américaine Chelsea Manning est sans doute l'une des lanceuses d'alerte les plus connues au monde. Ex-analyste pour l'armée américaine stationnée en Irak, elle décide de devenir, en 2010, une source pour WikiLeaks (site spécialisé dans la fuite de données). Des dossiers top secrets (classés secret défense) font alors surface impliquant l'armée américaine et ses bavures. On se souvient notamment de la vidéo des exactions de soldats américains sur des civils irakiens ainsi que des photos de la prison d'Abou Ghraib. Au total, elle avait fait fuiter plus de 700 000 documents confidentiels ayant trait à la guerre en Irak et en Afghanistan. Elle sera condamnée en 2013 à 35 ans d'emprisonnement. En 2017, le président américain Obama décide de commuer sa peine : elle sort de prison en mai 2017 (après sept ans d'emprisonnement tout de même !). À Lire sur le sujet Chelsea Manning. L'ex-informatrice de WikiLeaks à nouveau écrouée

- Erin Brockovich

Portée à l'écran par Julia Roberts (en 2000), Erin Brockovich est devenue une héroïne de la cause écologique en dénonçant la pollution des nappes phréatiques d'une grosse entreprise (PG & E). Elle a mis au jour le déversement illégal de chrome en lien avec de nombreux cancers dans la région. Les poursuites se soldent par 333 millions de dollars de dommages et intérêts pour les quelque 600 plaignants.

- Frances Haugen

Cette lanceuse d'alerte américaine à l'origine des « Facebook Files » a fait fuiter en 2021 des centaines de documents internes. Elle accuse le géant américain de manque de sécurité pour

ses utilisateurs. À lire sur le sujet Frances Haugen, la lanceuse d'alerte qui fait trembler Facebook, auditionnée par le Parlement

- Tarana Burke

Si tout le monde connaît dorénavant le mouvement #MeToo, on connaît un peu

moins celle qui est à son origine : Tarana Burke. Cette Américaine avait fondé, dès 2006, l'association MeToo pour lutter contre les violences sexuelles commises sur les petites filles noires.

 - Kathryn Bolkovac

Cette lanceuse d'alerte, ancienne membre de la force de police internationale de Bosnie, s'est fait connaître pour avoir dévoilé, en 2002, le recours par plusieurs officiers à des prostituées et leur participation avérée au trafic d'être humains.

- Ai Fen

Elle n'est pas américaine mais chinoise. Chef du service des urgences de l'hôpital central de Wuhan, en Chine, Ai Fen a tiré la sonnette d'alarme dès le 30 décembre 2019 sur la circulation d'un virus inquiétant : le coronavirus... Elle a été sanctionnée, puis convoquée par la police pour divulgation de « fausses rumeurs »

 

Source : Le Telegramme par Laura Baudier