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« Ils ont volé une vie normale à nos enfants »

Ouest France 

Le médicament antiépileptique Dépakine est à l’origine de malformations, retards divers, troubles du comportement et autistiques. Les familles dénoncent un scandale sanitaire et réclament un fonds d’indemnisation. Témoignage de deux couples de Loire-Atlantique.

 

À fleur de peau entre épuisement et colère, ils ont besoin de parler pour vider leur sac. Béatrice et Jean-Philippe Bouvet et Anne et Henri-Jean Bigot, deux couples d’Ancenis et Carquefou (Loire-Atlantique) sont parents d’enfants Dépakine. Un médicament antiépileptique qu’Anne et Béatrice ont pris pendant leurs grossesses. Ils se sont connus grâce à l’Apesac, l’Association des parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant. Aujourd’hui, ils ne veulent plus se taire, « parce qu’on est face à un scandale sanitaire encore plus énorme que celui du Médiator », disent-ils.

 

Le rapport à charge de l’Inspection générale des affaires sociales, l’Igas, sur le valproate de sodium, la molécule contenue dans la Dépakine (1), les conforte dans le combat qu’ils mènent. Les patientes traitées « ont été informées trop tard des risques en cas de grossesse », dit l’Igas. Pourtant, les premières alertes sur le caractère tératogène (susceptible de provoquer des malformations congénitales) des traitements antiépileptiques apparaissent au début des années 1980. « L’inertie et le manque de réactivité de l’État et du laboratoire Sanofi », qui commercialise le médicament depuis 1967, sont aussi pointés par l’Igas.

 

Nombreuses pathologies

 

Les parcours du combattant des deux familles ont plus que des similitudes. Juliette est née en 2005 et les jumeaux Léa et Mathis en 2007. Béatrice et Anne disent la même chose : « Personne ne nous a dit qu’il y avait des risques, sauf pour le spina-bifida (2) », ni le gynécologue, ni l’endocrinologue, le neurologue ou le médecin traitant.

 

Au fur et à mesure de la croissance de Juliette, Béatrice et Jean-Philippe découvrent les troubles dont elle souffre : troubles du langage, visuels, psychomoteurs et du comportement, phobie sociale, retard mental… Pour Léa, Anne évoque crises d’angoisse, énurésie, retard de langage, dysphasie, phobies… et le corset qu’il faut porter pour sa scoliose. Mathis a des problèmes de motricité, de comportement, il fait des colères dues aux frustrations et échecs.

 

« On était dans l’errance. Il a fallu attendre 2013 pour qu’un neuro-pédiatre nantais écrive noir sur blanc que la Dépakine était en cause dans les troubles et retards de Juliette », raconte Béatrice. « Au début, on n’a pas percuté, on ne s’est pas rendu compte de l’ampleur des pathologies », souligne Henri-Jean. L’an passé, Mathis a été diagnostiqué Asperger, un trouble du spectre autistique.

 

« On porte ce qu’ils n’ont pas assumé »

 

Orthophoniste, psychomotricienne, ergothérapeute, enseignant spécialisé, auxiliaire de vie scolaire… les enfants ont besoin d’accompagnements spécifiques. Juliette, reconnue handicapée de 55 à 75 %, est scolarisée en classe d’intégration. Ce sera aussi le cas de Léa l’an prochain.

 

Aujourd’hui, les deux familles montent au créneau, avec celles des 1 090 victimes recensées par l’Apesac à ce jour et dont le nombre ne cesse d’augmenter. « J’en veux à Sanofi et à l’Agence nationale de sécurité du médicament, car on porte ce qu’ils n’ont pas assumé. Ils ont volé une vie normale à nos enfants », clame Béatrice, qui est aussi coordonnatrice régionale de l’association. « La grande question, c’est comment aider enfants et parents », tonne Henri-Jean.

 

Les attentes des familles portent sur quatre points principaux : une prévention efficace pour les femmes qui souhaitent avoir un enfant ; la mise en place d’un centre de diagnostic pour aider les familles ; une prise en charge médicale, thérapeutique et scolaire adaptée des enfants. Pour cela, la création d’un fonds d’indemnisation est demandée. « On est seuls, confrontés au handicap et il nous faut tout justifier, assurent les deux couples. C’est la double peine. On est usés, épuisés. »

 

(1) Dépakine mais aussi Dépakote, Dépamide, Micropakine.

 

(2) Cette malformation survient avant la naissance, provoquant un développement incomplet de la colonne vertébrale, qui cause paralysie et perte de sensibilité des membres inférieurs.

source : Ouest France  

 

 

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