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Dans la presse en 2016

Dépakine : l'enquête pénale avance

La Figaro

INFO LE FIGARO - Aujourd'hui, les généticiens s'interrogent sur le lien entre les pères traités au valproate et la maladie de leurs enfants.

Enfin. Le rapport concernant la Dépakine demandé par la ministre de la Santé à l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) est quasiment achevé. La Dépakine est ce médicament mis sur le marché en France en 1967 

 

et accusé d'avoir des effets indésirables graves sur le fœtus quand il est absorbé par une femme enceinte. Les trois hauts fonctionnaires ont planché sur le rapport pendant six mois, il est actuellement au stade de la relecture. Selon nos informations, on se dirigerait vers une mise en cause des médecins. La ligne choisie est donc l'exact opposé de ce qui s'était fait pour le Mediator. À l'époque, le laboratoire avait été placé en première ligne.

Ouverte début octobre, l'enquête pénale, qui en est toujours au stade préliminaire, avance elle aussi. Et le parquet semble déterminé à ouvrir une information judiciaire, donc à nommer un juge d'instruction. Des médecins ont déjà été entendus par les gendarmes de l'Oclaesp (Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique). Cet office avait déjà travaillé sur le Mediator et tous les observateurs avaient été unanimes pour saluer leur travail.

Les effets néfastes de l'acide valproïque

Les enquêteurs doivent notamment déterminer si le laboratoire Sanofi et les autorités sanitaires ont transmis assez tôt aux médecins et aux patientes les connaissances issues de la littérature scientifique. En effet, depuis le début des années 1980 (étude de Robert dansThe Lancet en 1982), l'acide valproïque, principe actif de la Dépakine, est accusé d'avoir des effets indésirables graves chez le fœtus. Il s'agit notamment d'une maladie appelée spina-bifida dont les conséquences peuvent être dramatiques: troubles moteurs, paralysie, incontinence. Il est aussi responsable d'une forme d'autisme et de troubles du comportement, mais les notices attendront quelques années après la parution d'études scientifiques - les premières datent de 1994, puis 2000 - pour mentionner ces effets. Le travail du parquet est donc de déterminer quand et quels renseignements auraient pu - et dû - être fournis aux femmes épileptiques.

Enfin, selon nos informations, la question de la transmission du syndrome valproate par le père est actuellement posée par plusieurs généticiens. Jusqu'à présent, les chercheurs s'étaient intéressés uniquement à la «toxicité directe» du médicament, c'est-à-dire aux expositions mère-foetus. Or avec l'épigénétique, cette science qui étudie les changements dans l'activité des gènes n'impliquant pas de modification de la séquence d'ADN et pouvant être transmis lors des divisions cellulaires, la donne peut changer.

«C'est une possibilité», observe le Dr Hubert Journel, généticien au Centre hospitalier Bretagne-Atlantique. Il déplore que les scientifiques ne s'intéressent pas aux pathologies paternelles à propos des enfants. «Il faut se poser la question de la transmission par le père. Si l'observation montre des cas, alors il faudra lancer des publications scientifiques pour prouver ce lien», explique-t-il.

Hubert Journel raconte avoir déjà déclaré un cas à l'Agence du médicament. Il s'agit d'un couple dont la femme est ce que l'on appelle une «enfant valproate». Elle est en effet malade, sa mère Dr Hubert Journel, généticien au Centre hospitalier Bretagne-Atlantique ayant pris de la Dépakine pendant sa grossesse. Cette femme n'est pas épileptique et n'a donc pas pris de traitement quand, à son tour, elle s'est trouvée enceinte. En revanche, son mari, épileptique, est traité à la Dépakine. Or leur enfant est autiste. De quoi conduire le généticien à s'interroger sur l'origine du trouble. Marine Martin, la présidente de l'Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant (Apesac) assure avoir une vingtaine de remontées. Il s'agit d'enfants dont le père - et non la mère - ont pris du valproate. Tous ont un faciès caractéristique: lèvre supérieure fine, racines du nez large, narines antéversées, microcéphalie, etc.

Aujourd'hui, plus de 225 dossiers sont constitués dans le cabinet de Me Charles Joseph-Oudin, relatifs, chaque fois, à plusieurs enfants. Une quarantaine font l'objet d'une procédure judiciaire, que ce soit au civil ou au pénal. L'affaire Dépakine ne fait que commencer.


Que font les autorités sanitaires?

Imbroglio. Depuis novembre 2015,  les autorités sanitaires (Agence du médicament et Haute Autorité de santé) recommandent, à la place de la Dépakine pendant la grossesse, un autre anticonvulsivant, le Keppra, du laboratoire belge UCB, «en première intention». Ceci en raison des effets secondaires observés chez le fœtus de la Dépakine, le médicament de Sanofi. Petit problème: UCB déconseille son propre produit aux femmes enceintes. «Keppra ne doit pas être utilisé pendant la grossesse sauf en cas de nécessité», peut-on lire sur la notice de décembre dernier. L'Apesac (Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant) assure recevoir des appels de mères ayant pris du Keppra pendant leur grossesse: leurs enfants sont handicapés et leur faciès est caractéristique.

Anne Jouan Source : http://sante.lefigaro.fr/actualite/2016/01/14/24492-depakine-lenquete-penale-avance

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