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Scandale de la Dépakine : cinq questions pour comprendre la « class action »

Sud Ouest

14 322 femmes auraient été exposées à la Dépakine entre 2007 et 2014. ©AFP QUENTIN SALINIER

Mardi 13 décembre, les victimes de la Dépakine ont lancé un recours collectif en justice (class action) envers le laboratoire pharmaceutique Sanofi, une première pour la santé en France.

Qu’est-ce qu’une « class action » ?

L’action de groupe, plus connue sous le nom de « class action », est une procédure en justice introduite en France par la loi de la consommation du 17 février 2014. Originaire des Etats-Unis, cette démarche, qui se veut collective, permet à un grand nombre de personnes, liées par un intérêt commun, de poursuivre une entreprise ou une institution en justice afin d’obtenir réparation de leur préjudice. Pour intenter un tel recours en justice, l’action doit être portée par une association de consommateurs agrée au niveau national.
Si le nom de cette démarche juridique revient autant aujourd’hui, c’est qu’une action de groupe vient d’être introduite à l’encontre du laboratoire pharmaceutique Sanofi mardi 13 décembre, dans le cadre du scandale de la Dépakine. Ce médicament antiépileptique, commercialisé par le laboratoire depuis 1967 serait responsable de malformations chez le fœtus. L’association Apesac, qui fédère près de 3000 familles, reproche au laboratoire de ne pas avoir informé les femmes enceintes de ces risques importants.

Est-ce une première en France ?

Des « class action » ont déjà eu lieu en France, notamment dans le secteur de l’immobilier ou de la téléphonie.  » Depuis la mise en application de la loi autorisant cette démarche juridique, on relève environ huit actions de ce type », note Céline Aimé, juriste au CDAFAL (Conseil Départemental Associations Familiales Laïques).
C’est le cas par exemple de l’association UFC-Que Choisir qui a traduit le groupe Foncia devant les tribunaux, en octobre 2014 ou encore l’association Famille Rurale qui a poursuivi le groupe SFR en mai 2015.

L’association UFC-Que Choisir a traduit le groupe Foncia devant les tribunaux, en octobre 2014. CRÉDIT PHOTO : ©AFP PHILIPPE HUGUEN

Si des procédures collectives ont donc déjà été menées en France, il s’agit en revanche d’une première dans le domaine de la santé.  » Les actions de groupe étaient exclusives au droit du consommateur, explique Marine Martin, présidente de l’association Apesac qui mène l’action dans le cadre du scandale à la Dépakine. « Mais depuis le 27 septembre 2016, un décret spécifique s’applique au domaine de la santé, notamment grâce à la ministre de la Santé Marisol Touraine qui a récemment revu la loi santé « .
Dans ces cas-là, l’action doit donc être portée par des associations agrées par le ministère de la Santé, comme c’est le cas de l’association Apesac, qui a donc pu déposer plainte pour les familles.

Quels sont les avantages de cette démarche ?

Avant tout, mener une action de groupe s’avère plus rassurant pour les plaignants qui se retrouvent souvent perdus devant la loi et qui ont tendance à abandonner leurs démarches.
Le soutien d’une association permet également de s’exonérer de tous frais de justice :  » le fait que les démarches soient gratuites encourage les plaignants à se lancer », explique Marine Martin.  » Les coûts des avocats ou des expertises ont en général tendance à les effrayer « .
Aussi, dans le cas de la Dépakine, un fonds d’indemnisation pourra être garanti pour les victimes.  » Une gigantesque bataille sur laquelle on se bat depuis longtemps « , note Marine Martin.  » Même si le laboratoire ne veut pas payer, les victimes seront indemnisées par l’État « .
Enfin, les procédures d’action de groupe sont plus rapides que les procédures individuelles déjà lancées par des familles contre le laboratoire Sanofi.  » Le juge a entre 18 et 24 mois pour statuer sur l’affaire « , explique Marine Martin. L’issue devrait donc être rapidement connue, même si l’action de groupe demeure complémentaire des autres actions déjà engagées au civil et au pénal. « Elle ne s’y substitue pas », précise Marine Martin.

Est-ce que cela va se développer en France ?

Seulement mis en place, en tout cas dans le domaine de la santé, il est pour l’heure difficile de déterminer si ce type d’action aura tendance ou non à se développer en France.

Marine Martin, présidente de l’association Apesac qui fédère près de 3000 familles victimes de la Dépakine ©CRÉDIT PHOTO : AFP BERTRAND GUAY

Marine Martin, présidente de l’association Apesac qui fédère près de 3000 familles victimes de la Dépakine ©CRÉDIT PHOTO : AFP BERTRAND GUAY

Si Marine Martin est plutôt optimiste :  » bien sûr que cela va se développer, il va y en avoir d’autres « , pour Céline Aimé, juriste au CDAFAL en revanche, encore trop peu de gens connaissent cette démarche.  » Contrairement aux Etats-Unis, où cela est entré dans les mœurs, en France, encore beaucoup de personnes ne savent pas que ce genre de démarche existe . Il suffit d’ailleurs de regarder le nombre de procédures qui ont déjà eu lieu pour s’en rendre compte, une dizaine seulement depuis 2014, ce n’est rien du tout « .
La faute selon elle, à une procédure encore trop encadrée par rapport à celle des Etats-Unis.  » Les démarches en France sont encore trop compliquées, il faut réunir un certain nombre de personnes dans un délais restreint, passer par une association reconnue, ça ne parle pas forcément aux gens « , note-t-elle.

Quelle sera l’issue de l’action lancée en justice dans le cas de Dépakine ?

Mardi 13 décembre, l’association Apesac, qui fédère près de 3000 familles de victimes a envoyé une lettre recommandée à Sanofi pour l’informer qu’elle allait mener une action de groupe à son encontre.
Dans quatre mois, si le laboratoire pharmaceutique n’a pas reconnu ses responsabilités, l’association pourra saisir la justice. Elle devra alors déposer au tribunal de grande instance de Paris, les dossiers de quatorze femmes traitées par le médicament Dépakine durant leur grossesse et ainsi en montrer les conséquences.
Le juge a ensuite entre 18 et 24 mois pour se prononcer.  » Le laboratoire n’échappera pas à ses responsabilités, la pression est forte, il va finir par céder « , espère Marine Martin.

 

Source : http://www.sudouest.fr/2016/12/14/scandale-de-la-depakine-cinq-questions-pour-comprendre-la-class-action-3026347-4696.php

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